1/3 - Un conseiller technique, à quoi ça sert ?

Article publié le 06/12/2018

A l’heure où le gouvernement annonce la suppression de 1600 postes de conseillers techniques et sportifs, nous vous proposons de découvrir l’univers de ces hommes et de ces femmes qui œuvrent au quotidien au service de la FFTA, que ce soit sur des missions régionales, nationales ou d’entrainement. Leur professionnalisme conjugué avec la passion qui les anime sont des éléments déterminants pour continuer à faire progresser le sport à tous les niveaux. 

Sophie Vessilier : Conseiller Technique et Sportif sur la région Auvergne Rhône-Alpes

Comment définis-tu ton métier ? Etait-ce une volonté de ta part de travailler dans le tir à l’arc ?
Oui, c’était une volonté ; je crois que je suis tombée dedans toute petite ! j’ai eu la chance de rencontrer un CTR (*) hors catégorie, Gaby Vergnol, qui m’a aidée tout au long de mon parcours d’archer et d’entraineur. Il m’a aidée à croire en moi, en mes capacités. Il m’a donné le goût du partage de cette passion. Mon parcours a été un peu long : initiateur, instructeur, BEES1, BEES2 et enfin professorat de sport. Aujourd’hui je réalise que chaque étape m’a permis de me construire et d’avancer un peu plus surement. Après le bac, je suis allée en fac de lettres, pour rassurer mes parents (!) et aussi valider un niveau d’études. J’en ai profité pour passer les BEES et commencer à entrainer professionnellement. Après 10 ans d’étude(!) j’ai réalisé que cela pouvait être un métier viable. Quelques années plus tard, le poste de CTS était vacant en Rhône-Alpes : j’ai saisi l’opportunité de changer de métier (toujours sous les conseils de Gaby !).

C’est un métier passionnant où aucune journée ne se ressemble : on travaille en relation avec des bénévoles du Comité Régional, des Comités Départementaux, des clubs, les entraineurs, les membres de l’ETR (**), mes collègues CTS de ma discipline et des autres fédérations … et tout ça sur des missions très variées. On est parfois sur les terrains de tir en compétition ou à l’entrainement, on est aussi en salle de cours, de réunion, derrière son bureau et son ordinateur seul, ou au téléphone ! ça bouge tout le temps ; il y a énormément de travail et on ne s’ennuie jamais. Il faut juste une bonne méthode de travail pour s’organiser et gérer toutes les tâches et les imprévus 


Quelles sont tes missions ?
Aujourd’hui j’ai un peu perdu mes missions d’entrainement. Je suis plus manager d’équipe : équipe de dirigeants, équipe de pros. J’organise les actions de formation et sportives pour le comité régional. Je coordonne l’ETR. Grâce à ces missions avec l’ETR, j’ai toujours un pied sur le terrain : je réalise au maximum des actions avec eux. Cela me semble important pour ne pas devenir trop éloignée de la réalité du terrain. J’accompagne les élus dans la préparation et la mise en œuvre du projet régional. Pour cela mon lien avec le terrain est aussi primordial.

J’ai également des missions au niveau national pour la formation : DEJEPS et CQP TS. C’est intéressant pour moi d’assurer ce travail d’équipe avec des collègues pour pouvoir échanger. Le risque de ce métier est de se retrouver enfermé tout seul dans sa région et ne pas évoluer, voire régresser. Je participe régulièrement à des groupes de travail au niveau national, pour apporter mon expertise et pour échanger avec mes collègues CTS ou CTN.

A quel niveau interviens-tu auprès des clubs et des archers de ta région ?

Nous proposons des stages pour accompagner les meilleurs archers régionaux : on organise de la détection puis des stages et des entrainements, pour les jeunes et les adultes en FITA. Nous avons décliné la logique de l’ETAF pour accompagner les clubs formateurs régionaux. J’interviens sur certaines formations, et j’organise tous les jury d’examens. Mon lien passe énormément par l’ETR avec qui je travaille : eux fonctionnent dans les clubs (en tant qu’entraineurs tous les jours).


Quels sont les grands projets de développement du tir à l’arc dans ta région ?

Nous avons développé notre projet en nous appuyant sur le projet fédéral : 2 thématiques s’imposent :

  • Développement de la pratique FITA chez les jeunes
  • Formation de cadres

L’organisation de la filière par équipe compte pour nous : plus de 120 équipes y participent. Nous nous efforçons de proposer de belles compétitions ; mais aussi d’accueillir régulièrement des compétitions nationales.

Compte tenu de notre position géographique : la formation des CQP pour le tourisme est un axe important. Nous travaillons aussi à la structuration des clubs.

Nous travaillons en collaboration avec les 12 CD pour assurer une cohérence dans le développement de ce projet. 12 départements : c’est aussi 12 fonctionnements ; nous avançons doucement mais sûrement. C’est passionnant.

Nous venons d’embaucher un Chargé de Développement Sport, Pierre MERSANT, DEJEPS, pour m’accompagner dans toutes ces missions de terrain (suivi des clubs, des stagiaires en formation, des archers et des CD). Nous avons aussi créé une Commission Développement pour animer notre projet, le faire vivre durant le mandat mais aussi avancer sur des thèmes plus généraux :

  • L’emploi
  • La mutualisation
  • Le sport pour tous : dimension loisir


Quelles conséquences vont avoir les mesures annoncées par le gouvernement à l’horizon 2024, pour toi-même, pour le développement du tir à l’arc ?

J’ai beaucoup de craintes. Le projet annonce une disparition de notre statut, pas de nos missions !!! qu’est-ce que cela implique ? si je ne suis plus fonctionnaire, je deviens salariée de nos structures : la fédération ou le comité régional ? je ne crois pas que celles-ci en aient les moyens financiers. Cela reviendrait à reporter ces sommes sur les licences ? Ce n’est pas raisonnable !

Aujourd’hui nous travaillons sans respecter la CCNS : quel CTS comptabilise les nuits passées en dehors de chez lui, les heures cumulées chaque jour et soirée … et les récupérations qui vont avec ? Aujourd’hui nous acceptons tous des conditions « spéciales » parce que nous aimons nos métiers. Nous avons été formés ainsi ; j’évoquais Gaby : il travaillait comme cela, c’est cela qu’il m’a transmis. Demain, avec un autre statut, pas sûr que la même foi nous anime …

En toute modestie : si nous n’assumons plus ces missions ; elles n’existeront plus et le sport français accessible à tous va disparaitre. Nous serons centrés sur l’élitisme avec ceux qui en auront les moyens. On est sur la problématique de disparition du service public. 

Article tiré du magazine "Le Tir à l'Arc" n°863 | Photos : Ange Jimenez / Adrian Boyer / FFTA