2/3 - Un conseiller technique, à quoi ça sert ?

Article publié le 11/12/2018

A l’heure où le gouvernement annonce la suppression de 1600 postes de conseillers techniques et sportifs, nous vous proposons de découvrir l’univers de ces hommes et de ces femmes qui œuvrent au quotidien au service de la FFTA, que ce soit sur des missions régionales, nationales ou d’entrainement. Leur professionnalisme conjugué avec la passion qui les anime sont des éléments déterminants pour continuer à faire progresser le sport à tous les niveaux. 

Sandrine Vandionant : Directrice du Développement au sein de la Direction Technique Nationale

Tu as été athlète de haut-niveau. Quelles ont été les étapes de ta vie professionnelle qui t’ont amenée à tes missions de responsable du développement au siège de la FFTA ?
Tout d’abord, avant d’être une professionnelle, j’ai été bénévole et même secrétaire et présidente de club. Je me suis aussi occupée de l’initiation, de l’entraînement…dans la plupart des clubs où j’étais licenciée. Aujourd’hui encore j’accompagne quelques archers car un cadre technique est avant tout un passionné. 

Lorsque j’ai été reçue au concours de recrutement de professeur de sport c’était en 2003, j’ai été affectée en tant que CTR (cadre technique régional) de Bretagne. Dans le cadre de mon année de titularisation, j’ai donc, par exemple, réalisé un état des lieux du tir à l’arc dans cette région puis proposé un nouveau projet de développement.

Seulement un an plus tard, mon projet sportif m’a amenée à intégrer le pôle de l’INSEP et j’ai alors basculé sur un poste de formatrice (à l’INSEP de 2004 à 2010). Il m’a fallu m’adapter car j’ai avant tout été formée pour devenir entraîneur et non formatrice. Dans ces missions j’accompagnais, principalement des sportifs de haut-niveau de toutes disciplines, à devenir professeur de sport. Il fallait les préparer au concours et au métier futur. Mes champs d’intervention étaient divers : de la méthodologie de projet à l’environnement législatif et réglementaire du sport. 

Après deux années, j’ai coordonné la préparation d’un des oraux du concours (prof de sport) ce qui m’a amenée à construire une stratégie de préparation et coordonner une équipe de formateurs. Si l’INSEP est connu pour la recherche de l’excellence sportive c’est aussi le cas dans d’autres domaines comme la formation, le médical…travailler à l’INSEP c’est toujours chercher à faire mieux, à mieux former, mieux accompagner les sportifs dans leur reconversion…c’est aussi être au contact de brillants professionnels qui vous font progresser.

En 2011, j’ai réintégré les effectifs de la FFTA. J’étais principalement formatrice (DEJEPS et DESJEPS). Accompagner les stagiaires sur ces formations professionnelles, c’est aussi réfléchir sur des contextes variés de clubs et guider pour mettre en place des projets (de développement et d’entraînement) adaptés aux réalités de terrain. 

En 2015, Benoît DUPIN m’a proposé ce poste de responsable du développement créé au sein de la Direction Technique ; je ne m’étais jamais projetée sur un poste de ce type et je ne savais pas si j’en avais les compétences. 

Quelles sont les thématiques sur lesquelles tu travailles ?
Une des richesses (et des complexités) de ce poste est que les thématiques sont très variées. Dans un premier temps, la commande qui m’avait été faite était de répondre aux attentes du ministère sur des thématiques très spécifiques comme la féminisation ou la citoyenneté. J’essayais donc de faire le lien avec les besoins du tir à l’arc. 

Sur cette nouvelle olympiade, il a été possible d’envisager les choses un peu différemment. Il y a le projet fédéral dans lequel nous tentons le plus possible de répondre aux attentes de l’Etat et bien entendu des actions qui demeurent d’intérêt général à part entière. Nous avons par exemple fait évoluer le plan de féminisation vers le développement de la mixité homme-femme. 

Une autre thématique est le développement de la pratique en milieu scolaire qui va par exemple se concrétiser en 2019 avec la première formation nationale de professeurs d’EPS. Ces professeurs pourront ensuite former dans leur académie d’autres enseignants.

Je travaille également sur le projet de refonte des labels et plus particulièrement sur l’accompagnement à la structuration des clubs. Ce dispositif a pour but d’accompagner les clubs dans la conduite de leur projet associatif. Qu’il soit un club à plus de 100 licenciés ou un club à 30 nous devons être en mesure de l’aider à progresser. 

Une thématique qui est à 100% d’intérêt général est le sport santé. Le sport-santé renvoie au « sport-santé-bien-être » qui correspond à une pratique sportive qui contribue à entretenir sa bonne santé. Elle a par exemple pour but de lutter contre les effets du vieillissement ou de la sédentarité comme l’obésité ou l’hypertension artérielle…L’autre facette du sport-santé est le sport sur ordonnance qui est une pratique sportive adaptée à une personne souffrant d’une affection de longue durée (diabète, cancers…). C’est un gros chantier qui a démarré, qui s’organise et se structure pour que le tir à l’arc apporte sa contribution. 

Le trophée national des mixtes 2018

 

Quelles sont tes relations avec le milieu fédéral ?
Les premières relations se font avec les membres des commissions dont je fais partie. En effet, la majeure partie des projets sur lesquels je travaille est décidée par les commissions puis validées par le comité directeur. Je dois donc conseiller et être force de propositions auprès des élus bénévoles de la fédération. Mon positionnement transversal fait que je dois contribuer au maintien de la cohérence entre les actions des différentes commissions entre elles et avec le projet fédéral Horizon 2024…

Ensuite, j’ai un rôle de conseiller auprès des clubs tout comme le sont mes collègues CTR. En effet, sur certains dispositifs spécifiques, il est fréquent que les clubs nous sollicitent directement. Sur des opérations nationales, il peut s’agir de mobiliser le réseau de comités et de clubs. Or, quand on demande aux clubs de contribuer à ces opérations, nous devons être en mesure de les aider, de faire en sorte de leur simplifier le « travail ». Par exemple, dans le cadre du Trophée des Mixtes, nous avons créé et mis à disposition des clubs ou CD organisateurs des outils pratiques pour faciliter l’organisation sous ce nouveau format de rencontre.


Quelles conséquences peuvent avoir les mesures annoncées par le gouvernement à l’horizon 2024 en matière de développement de la pratique sportive et plus spécifiquement du tir à l’arc ?
Un axe important de la campagne de candidature pour les JO 2024 était l’héritage, que ces Jeux à Paris laisseraient à toute la France. Pourtant la baisse des crédits alloués au sport a été annoncée. Cette annonce s’est ajoutée à la baisse du CNDS et ses orientations de financement plus que limitées qui ont touché moralement les bénévoles et financièrement les structures qu’ils gèrent.

L’argument est que le sport doit avoir un nouveau modèle économique mais le mouvement sportif n’est pas prêt. Tout semble se faire dans la précipitation. A mon avis les risques sont multiples. Le premier est le désengagement des bénévoles. Or ils sont incontournables dans l’équilibre de l’organisation du sport en France.

Un autre risque (lié aussi au premier) est l’augmentation du coût de la pratique sportive. Celle-ci devra être assumée par les pratiquants eux-mêmes puisque, souvent, les collectivités ne peuvent plus investir davantage. Si les coûts augmentent : le sport pourrait devenir une pratique accessible uniquement à une certaine « élite sociale ». 

Il serait alors difficile d’atteindre l’objectif du ministère de 3 millions de sportifs en plus. Les jeunes y auraient moins facilement accès alors qu’on sait qu’ils sont déjà de moins en moins actifs (avec les risques sur la santé que cela engendre). Les retraités dont le pouvoir d’achat baisse seraient également directement impactés. Or la pratique en club et la convivialité qui est une des valeurs du tir à l’arc diminuent le risque de rupture sociale pour cette population.

L’annonce de suppression de 1600 postes de conseillers techniques sportifs (CTS) a été pour le moins surprenante tellement elle ne semble pas anticipée. Finalement, plusieurs versions circulent, du maintien du statut de fonctionnaire mais sous l’autorité unique du DTN ou embauchés par les fédérations. Nous sommes actuellement 26 cadres d’Etat à la FFTA. La FFTA, comme beaucoup d’autres fédérations, n’aurait pas les moyens financiers de nous embaucher. La seule solution serait d’augmenter drastiquement le prix des licences ce qui n’est pas souhaitable.   

Quand on parle cadre technique on pense souvent à la préparation des athlètes aux JO mais un cadre technique n’est pas seulement un entraîneur (même lorsqu’il est entraîneur !). C’est un formateur, un conseiller, un éducateur, un manager, un coordonnateur…et surtout un passionné de sport et de tir à l’arc ! 

Article tiré du magazine "Le Tir à l'Arc" n°863 | Photos : FFTA